• [INTERVIEW] : La designer Margaux Keller

    Portrait de Margaux Keller – photo : Laure Melone

    Nous avons aujourd’hui le plaisir de poser quelques questions à la designer Margaux Keller, formée à l’école Olivier de Serres puis à l’école Boulle. Après avoir fait ses armes auprès des plus grand designers (Starck, Quittlet, Baron…) puis un passage au centre de recherche « La Fabrica » de Trévise, elle retourne chez elle à Marseille en 2011 où elle fonde sa propre agence : Margaux Keller Design Studio. Retour sur son parcours et sa vision du design :

    Pouvez-vous nous dire quelques mots sur votre formation et votre parcours professionnel?
    J’ai été formée à l’école Olivier de Serres puis à l’école Boulle, de laquelle je suis sortie avec un Diplôme supérieur d’arts appliquées d’architecture intérieure et de design mobilier. A la suite de ça je suis passée par l’agence Philippe Starck en stage où j’ai été formée par l’excellent Eugeni Quittlet, au dessin de mobilier et de chaises plus particulièrement. Ensuite direction l’Italie, à La Fabrica, centre de recherche et communication du groupe Benetton : une sorte de Villa Médicis orientée design qui accueille des jeunes créatifs du monde entier en résidence à Trévise, non loin de Venise, pendant une année. Un épisode que j’ai vécu comme un tremplin, aux cotés du directeur artistique Sam Baron, qui m’a permis de développer ma créativité et de devenir réellement designer. En 2011, retour à Marseille, où je fonde mon agence Margaux Keller Design Studio.

    Sur quel(s) sujet(s) travaillez-vous en ce moment?
    Je travaille sur un projet de chaise modulable livrée en kit pour une marque française qui fabrique en France, ainsi que sur un restaurant de 250m2 au pied de la Ste Victoire en Provence. Au delà de ça je continue au quotidien de jouer mon rôle de directrice artistique de l’éditeur Bibelo, pour qui j’assure également le dessin de nouveaux produits. RDV M&0 Janvier 2018 !!

    Combien de personnes compte votre agence?
    Je suis seule à mon compte avec des stagiaires qui tournent régulièrement (avis aux curieux je recherche tout le temps des perles rares et qui sait une embauche à la clé ) , mais je travaille en lien étroit au sein même de l’agence avec un architecte Bertrand Guillon et une graphiste Marion François. Nous sommes souvent amenés à travailler ensemble sur des sujets de design global, on se complète vraiment bien.

    Quelle est votre méthode de travail habituelle?
    Les projets sont souvent découpés en 3 phases. Une phase créative où je dessine beaucoup à la main, sur mon carnet. Puis je passe rapidement sur un logiciel de modélisation en 3D qui me permet de rentrer dans le détail des courbes, des volumes et des proportions. Parfois un dessin qui me parait réussi ne le sera pas en modélisation et cet outil me permet aussi de faire varier les modèles afin de cherche la forme parfaite. Ensuite on passe au développement de produit ou j’affine le design de l’objet suivant les remarques que l’on a pu échanger avec le client. Une fois le dessin validé vient la dernière phase, la mise en fabrication du prototype, s’en suivra des aller retours avec le fabricant pour réaliser des modifications.

    Fréquentez-vous les blogs et sites Internet consacrés au design, et si oui lesquels?
    Je l’ai beaucoup fait par le passé, mais aujourd’hui je n’ai plus vraiment le temps de passer des heures sur ces sites malheureusement. J’apprécie malgré tout certains sites comme Designboom qui développe un panel très large, la revue du design évidemment que je suis depuis des années, en général je consulte principalement les newsletter qui m’intéressent et que l’on m’envoie. Je reste en revanche attentive aux projets qui sortent par le biais d’instagram : je suis des designers, des instituts, des musées, des artistes, c’est un bon outil pour une mise à jour choisie, sélective et instantanée sur les projets. Il faut malgré tout faire attention car cette grande ouverture sur le monde créatif à la portée de tous via ces réseaux peut avoir aussi tendance à lisser les projets, comme avec l’outil Pinterest par exemple. Beaucoup de choses se ressemblent. Je m’en méfie malgré tout.

    Y a-t-il un ou plusieurs designers, ou créateurs, qui vous inspirent au quotidien?
    J’aime m’inspirer plutôt du quotidien, de notre façon de vivre, et aussi essentiellement du patrimoine, de l’existant : l’artisanat, les us et coutumes, les traditions, les savoir-faire etc sont de vrais moteurs créatifs pour moi.

    S’il y avait une chose à changer dans le design?
    La définition qu’en donnent les magazines, qui sont les principaux vecteurs de communication sur notre métier : le design est souvent associé à un style. Inqualifiable : tantôt contemporain, tantôt épuré, tantôt scandinave c’est un mot qui est employé à tort et à travers et qui ne veut plus rien dire alors que c’est en réalité une véritable pratique, un moyen qui va nous permettre d’aboutir à une finalité : un objet, un espace, un logo, un vêtement etc. . Je dis souvent qu’on ne peut pas dire « c’est design » devant un canapé, autant qu’on ne peut pas dire « c’est peinture » devant un tableau !!

    Quelle est la commande que vous aimeriez vous voire confier?
    J’aimerais beaucoup me pencher sur le design global d’un hôtel, je trouve que ces espaces sont aujourd’hui trop éloignés de nos modes de vie et nos attentes dans ces moments là. Il y aurait tellement à repenser, redessiner, recréer. Face au géant Airbnb, aux nouveaux modes de partages de lieux de vie, l’hôtellerie doit à mon sens se moderniser.

    De votre point de vue, le métier de designer est-il enviable aujourd’hui?
    Ça oui, mais c’est un métier qui n’est vraiment pas facile d’accès pourtant. Dès l’école on nous met vite en garde, il n’y aura pas de places pour tout le monde, c’est une jungle pour parvenir à s’imposer, à être identifier dans la masse ! Et pourtant, j’ai la conviction que lorsqu’on est passionné, démesurément motivé, que l’on sait proposer une vraie réponse juste et en adéquation avec les besoins d’aujourd’hui : il y a une place. Je n’ai vraiment pas la sensation du travail lourd et fastidieux au quotidien, c’est un tourbillon bouillonnant chaque jour, c’est très prenant mais j’adore vivre les différents projets qui se proposent à moi. C’est plus qu’un temps plein : les projets nous suivent 24h/24 !

    Pour finir, un livre, un site Internet, un film, une découverte récente… que vous auriez envie de partager avec nous?
    Un livre rétrospective sur l’Oeuvre du photographe Stephen Shore, que je me suis procurée aux rencontres de la photographie à Arles. J’adore sa façon de capturer la banalité du quotidien. Ses images sont très inspirantes, autant par les sujets qu’elles proposent que les couleurs. Dans la lignée de Martin Parr, j’aime cette éloge de l’ordinaire, avec parfois un ton quand même satirique, clin d’œil mais poétique. Je reprends ça aussi dans ma façon d’envisager le design.

    Découvrez quelques réalisations de Margaux Keller :

    Fauteuil SWIM pour Bibelo
    AMARYLLIS pour Bibelo

    LE COIFFEUR

    LA BOUTIQUE GELLE FRERES PARFUMEUR

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