Interview: Jean Couvreur
Nous sommes heureux de vous présenter aujourd’hui le travail de Jean Couvreur, un designer diplômé de l’Ensci en 2006 et intervenant aujourd’hui dans les domaines du design d’objet et du design d’espace.
Pouvez-vous nous dire quelques mots sur votre formation et votre parcours professionnel?
Après avoir obtenu un BTS Création Industrielle, j’ai intégré l’ENSCI les ateliers dont j’ai été diplômé en 2006. J’ai ensuite commencé à travailler pour le scénographe Pascal Payeur sur plusieurs expositions, puis rapidement à mon compte ou en collaboration, principalement sur de l’aménagement d’espace. En 2010, je suis parti quatre mois en résidence à Nontron dans le Périgord travailler avec des artisans métiers d’art de la région. J’y ai développé des projets collaboratifs valorisant la matière et les savoir-faire, un thème que je poursuis dans mes projets actuels. Enfin jusqu’à la fin de cette année, je suis résident aux Ateliers de Paris.
Sur quel(s) sujet(s) travaillez-vous en ce moment?
Je prépare quelques pièces (luminaire et centre de table) pour la Galerie IndexOfDesign qui seront présentées à Chic Art Fair fin Octobre. Je dessine également un couteau Nontron (groupe Forge de Laguiole). C’est un sujet passionnant auquel j’attache un caractère assez personnel. Et puis je présenterais un mobilier pliable dans le cadre des appels à projets du VIA à la rentrée 2012.
Combien de personnes compte votre agence?
Je travaille seul en ce moment. J’essaie de développer des projets plus personnels, cela me permet aussi de m’investir dans les collaborations.
Quelle est votre méthode de travail habituelle?
Je ne suis pas sûr de pouvoir décrire une méthode habituelle. Les contextes et enjeux m’ont toujours apparu très différents. D’autant plus que j’essaye d’apporter une méthodologie de travail spécifique à chaque projet.
Ma méthode serait plutôt d’essayer d’anticiper et d’évaluer les besoins que vont nécessiter chaque nouvelle démarche pour arriver au produit pertinent en respectant les objectifs fixés. Mais pour moi cette approche est très importante parce que le process de fabrication et de maturation du projet va guider ma réflexion.
Par exemple, la cuisson des enceintes Gama dure 10 jours et il n’y a que 3 cuissons par an. Sachant qu’il y a un nombre important de perte, il était nécessaire pour moi de travailler sur place, au plus proche des contraintes.
J’essaie aussi d’acquérir un maximum de savoir pratique sur la matière que je manipule.
Fréquentez-vous les blogs et sites Internet consacrés au design, et si oui lesquels?
Oui régulièrement dezeen, dailytonic, la revue du design… mais aussi des sites plus généralistes comme todayandtomorrow, bumbumbum, butdoesitfloat… Et puis aussi des blogs et sites très différents, d’infos, des blogs scientifiques ou encore «How it’s made» sur youtube.
Y a-t-il un ou plusieurs designers, ou créateurs, qui vous inspirent au quotidien?
J’aime le travail de nombreux designers mais ce n’est pas ma source première d’inspiration. Je crois que la confrontation d’univers différents permet de se libérer des choses attendues. Au quotidien, je vais plutôt regarder dans des domaines annexes au design. J’aime l’art de l’ingénieur, la technique de l’artisan et ses outils, traîner dans les magasins de bricolage ou de gros œuvre. J’essaie de repérer la part d’extraordinaire de ces objets et matières du quotidien. Quand même pour jouer le jeu des noms, je citerais Buckminster Fuller et Calder.
S’il y avait une chose à changer dans le design?
Je regrette qu’il y ait trop peu de culture du design en France. Faire appel à un designer est trop souvent un argument marketing, et les entreprises restent frileuses à s’octroyer leurs services. De manière générale, la considération du design n’est pas vraiment intégrée dans nos habitudes de consommation. La France consomme d’ailleurs très peu ce qu’elle produit. Ce n’est pas le cas pour bon nombre de nos pays voisins.
Quelle est la commande que vous aimeriez vous voire confier?
A Nontron, j’ai travaillé avec des artisans métiers d’art, en essayant de mettre en avant leur savoir-faire et leur matière première. Je crois que j’aimerais bien renouveler l’expérience avec une entreprise cette fois-ci. Un travail global, toujours en lien avec cette idée de valorisation d’un patrimoine industriel.
De votre point de vue, le métier de designer est-il enviable aujourd’hui?
Oui, évidemment. C’est un métier qui consiste à établir toutes sortes de connections, entre des idées, des envies, des matières, des consommateurs, des fabricants, des institutions, des architectes, des menuisiers… C’est un métier extrêmement riche et profondément humain.
Pour finir, un livre, un site Internet, un film, une découverte récente… que vous auriez envie de partager avec nous?
Le Pied de Biche. C’est une librairie galerie, rue de Charonne à Paris où l’on trouve plein de romans et comics américains indépendants.
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Quelques projets de Jean Couvreur:
Suspension TRENTE. Mousse de Polyéthylène cousue. 2011/ Prototype/ photo Matthieu Gauchet.
Centre de table OUTLINE. Acier plié, revêtement Nextel. 2011/ édition limitée Galerie IndexOfDesign / photo Matthieu Gauchet.
Enceintes GAMA, avec Tristan Chambaud-Héraud céramiste. Grès, cuisson Anagama. 2011/ Les résidences de l’Art en Dordogne /FRAC / photo Bernard Dupuy.
Lampe GIRAFE, avec Caroline Samuel, maroquinière. Cuir plein fleur, cousu main, Leds. 2011/ Les résidences de l’Art en Dordogne /FRAC / photo Bernard Dupuy.
Lampe PHOTOCHROME, avec Marilia Schetrite, vitrailliste. Verre formé à chaud, hêtre, tube fluo. 2011/ Les résidences de l’Art en Dordogne /FRAC / photo Bernard Dupuy.
Etagères FREQUENCES. Polystyrène, découpe fil chaud. 2010/ prototype / photo Bernard Dupuy.
Système de Présentation Itinérant pour l’APCI, avec Claire Emmanuelle Hue. 2009/ APCI / photo Bertrand Bozon.
Pour en savoir plus : www.jeancouvreur.com.