• Exposition Pierre Paulin au Centre Pompidou

    A partir du 11 mai 2016, le Centre Pompidou de Paris organise une rétrospective sur le travail du designer Français Pierre Paulin disparu en 2009. Architecte d’intérieur, créateur, designer, Pierre Paulin à marqué de son empreinte le monde du design en imaginant des pièces aujourd’hui iconiques.

    Durant une quarantaine d’années, le designer s’est attaché à travailler autour du confort et d’un nouvel art de vivre. Pour réaliser cette traversée dans la carrière et l’univers de Pierre Paulin, le Centre Pompidou à réuni près de soixante-dix pièces de mobilier et une cinquantaine de dessins inédits. Elle présente notamment des pièces phares devenues des « icônes » de l’histoire du design – Anneau, Mushroom, Ribbon Chair, Butterfly, Tulip… – et fait la part belle à des projets inédits, auto-édités, comme le Tapis-siège, la déclive, la tente, etc.

    En orientant la visite sur le thème du confort, le Centre Pompidou propose une nouvelle manière d’appréhender l’exposition, invitant le visiteur à établir un dialogue entre corps et confort en s’installant dans des rééditions des sièges les plus emblématiques du designer. L’exposition présente, enfin, une reconstitution inédite du living room de la Calmette, la villa dessinée dans les Cévennes par le designer dans les années 1990 : le public y expérimente un épais diwan (tapis) glissant le long d’un mur, se retournant sur le sol et accueillant quatre fauteuils Tongue.

    A propos de Pierre Paulin, Cloé Pitiot dans Code Couleur, n°25, mai-août 2016, pp. 16-21 écrivait :

    « En cinquante années de création, Pierre Paulin a su renouveler le siège, transcender l’aménagement de l’espace et fonder dans le même temps la première agence de design global en France. Le Centre Pompidou consacre une rétrospective inédite à son œuvre, de 1950 aux années 1990, à travers une centaine de meubles, environnements, projets et dessins. Pierre Paulin dessine pour tous : ses œuvres s’invitent dans un décor de James Bond comme au palais de l’Élysée. Ses qualités antagonistes, « dépouillement, austérité, appel lointain d’un rêve d’ascèse, mais aussi dynamisme, vitalité, humanité, ludisme, sensualité d’autant plus sensible qu’elle est souvent cachée, […] ont trouvé dans son art un terrain de coexistence pacifique », déclarait en 1983 son ami Alain Gheerbrant. Témoignant de son éclectisme, sa carrière fut l’une des plus prolifiques du 20e siècle. S’il eut le talent de capter l’air du temps, Paulin parvint surtout à le devancer.

    SES ŒUVRES S’INVITENT DANS UN DÉCOR DE JAMES BOND COMME AU PALAIS DE L’ÉLYSÉE

    Paulin est diplômé en 1950 du Centre d’art et de techniques, future école Camondo. Après avoir acquis la connaissance et la maîtrise des styles dans cette école, il débute sa carrière chez Marcel Gascoin, où il apprend les rudiments du modernisme : « À mes débuts chez Marcel Gascoin, nous nous inspirions beaucoup de la modernité suédoise, de ces produits tournés vers les jeunes ménages. J’avais 25 ans, j’étais concerné par des choses bien faites à des prix modestes », raconte l’artiste dans un documentaire (2007). En juillet 1951, il part découvrir le Grand Nord. L’architecture et le design scandinaves ainsi que les œuvres d’Alvar Aalto auront un impact décisif sur sa carrière. Il lit la revue Interiors présentant la nouvelle culture du design : Charles et Ray Eames, George Nelson, Eero Saarinen, Harry Bertoia… En quête d’efficacité et de liberté, Paulin confie ses projets à plusieurs éditeurs : A. Polak Originals, Meubles TV ou encore Thonet France. Pour A. Polak Originals, il réalise son célèbre fauteuil Anneau, sélectionné pour la XIe Triennale de Milan : « [J]e prends deux manches à balai, je les appuie contre le mur, et à partir de papier kraft, je réalise un anneau, qui sera en cuir, et le tour était joué ! Il me restait à trouver la structure pour supporter tout cela : ce furent deux rectangles d’acier plié, reliés par quatre bagues. Ce siège était simple, comme un sac », raconte-t-il. Chez Meubles TV, Paulin retrouve l’esprit de ses aspirations fonctionnelles et modernistes, une rigueur du trait, un goût des lignes et des proportions assumé. Avec Thonet France, il s’inspire du travail mené par les maisons américaines autour de la notion de gamme, proposant une grammaire de sièges de bureau et de mobilier. Il se penche sur la structure du siège, jusqu’à remettre en question la tradition de la tapisserie pour garnir les assises : en 1957 un premier brevet textile est déposé avec Thonet France.

    En 1958 à Paris, Paulin rencontre Kho Liang Ie, architecte d’intérieur et designer, alors directeur artistique d’Artifort, et Harry Wagemans, son président directeur général : ce trio enthousiaste donnera naissance à un design d’avant-garde à nul autre pareil. Les premières recherches sur les housses en textile extensible menées par Paulin franchissent un cap. Les premiers essais développés à partir de tissu pour maillots de bain se révèlent fructueux. Ce système de housse stretch monobloc, sans couture, révolutionne la manière même de penser le siège. Désormais, les housses s’enlèvent, se lavent, se changent selon les goûts, les couleurs, les saisons. Avec son idée de maillot de bain, Paulin dépoussière le siège, renouvelle les lignes, allège la structure, jusqu’à la faire disparaître sous la housse au profit d’une forme pure. Ses sièges deviennent des ponctuations chromatiques. C’est le cas du fameux Mushroom : « Le meilleur objet industriellement parlant que j’ai jamais dessiné. Comment voulez-vous faire plus économique ? Il n’y a qu’une seule matière, du tissu. Trois ronds en acier, […] et quatre tiges qui les réunissent entre eux. Ensuite on lui met son ‹ maillot de bain › et terminé ! »

    PAULIN DÉPOUSSIÈRE LE SIÈGE, RENOUVELLE LES LIGNES, ALLÈGE LA STRUCTURE, JUSQU’À LA FAIRE DISPARAÎTRE SOUS LA HOUSSE AU PROFIT D’UNE FORME PURE

    Au faîte de sa carrière, Paulin confiait : « J’ai toujours fait mon métier honorablement. En fait, j’aurais voulu être architecte. » Dans ce domaine, il avance en autodidacte, de stand en stand, d’aménagement en aménagement. Ses scénographies s’organisent autour de trois principes : la mise en tension (rondeur du monde naturel / âpreté du monde industriel ; souplesse des matières éphémères / rigidité de l’architecture porteuse), le retournement (le traitement du plafond devient celui du sol, et vice versa) et la ponctuation chromatique par le positionnement des éléments mobiles.

    En 1969, la commande par le président Georges Pompidou des aménagements des appartements privés du palais de l’Élysée synthétise les recherches menées par Paulin sur l’architecture mobile et réversible (type tente, igloo) et ses expérimentations liées aux plafonds. Paulin crée ainsi une tente-cathédrale, mêlant les principes architecturaux des églises, avec leurs croisées d’ogives, et les matériaux innovants des années 1970. La pierre des édifices sacrés devient élément de plastique préfabriqué, tandis que les vitraux se disloquent en crépitement de cannes de verre. Après avoir dessiné l’objet et sculpté l’espace, ce projet marque le point de départ d’une réflexion pour Paulin : il songe désormais à les faire jouer ensemble. En 1972, il développe son idée d’aménagement intégral, sous la forme d’un espace modulaire. Un projet ambitieux qui sera refusé mais qui l’engage dans une démarche de design global : conception et aménagement de l’espace, organisation même du processus de création, de fabrication, d’édition et de diffusion.

    Quand il crée ADSA, en 1975, avec Maïa Wodzislawska et Marc Lebailly, Paulin tente une nouvelle approche, réunissant créateurs et industriels autour des notions de design industriel et de design global. Inspiré par les expériences conduites outre-Atlantique, Paulin choisit de se fondre dans une équipe de créatifs : « Je suis l’expert que les chefs de projet consultent, le responsable et vraisemblablement l’auteur de la plupart des produits qui sont développés ici, mais je ne suis plus le seul concerné. » Paulin, éloigné du geste créatif comme de l’objet, a besoin cependant de retrouver la maîtrise du projet du début jusqu’à la fin. Il s’échappe souvent du collectif pour s’installer à sa table à dessin et rejouer ses gammes avec rigueur en revisitant les archétypes. En 1984, quand François Mitterrand fait appel à lui pour l’aménagement de son bureau présidentiel, il propose une scénographie théâtrale, entre innovation et retour au classicisme. On s’interroge sur son regain d’intérêt pour une facture classique. Comme il le dit lui-même, il tient dorénavant à redonner toute sa place au travail de la main. Dans sa collaboration avec l’Atelier de recherche et de création (Arc) du Mobilier national, Table Cathédrale, Siège Curule, chaise dite « de prestige » ou « à palmette », Paulin s’inspire tout autant du gothique que de l’antique ou du mobilier traditionnel asiatique. Avec trente ans d’avance, il ouvre en quelque sorte, au début des années 1980, la voie d’un retour à la lenteur.
    Prendre le temps de penser, de fabriquer. Choisir la matière, la toucher, la transformer par le juste savoir-faire du geste. Paulin revient aux fondamentaux, l’objet est suffisant, il redevient projet en soi. En 1995, il quitte ADSA pour se retirer dans les Cévennes où, à la Calmette, il sculpte la montagne pour y aménager sa vie. Il réalise son premier projet d’architecte, synthèse d’une carrière riche de cinquante années de création : « Je n’ai rien d’un maître à penser. Je suis un suiveur. La personne n’existe pas, c’est le produit qui doit primer. Le public ne devrait pas être intéressé par l’auteur. Si on me considère comme un maître, on a complètement tort. Je ne suis l’héritier de personne. Je n’ai pas d’héritier spirituel… » »

    Autre (Siège) 560 1959

    Banquette pour coin salon circa 1955

    Photographie : © Centre Pompidou / photo J.-C. Planchet / Dist-RMN-GP © Pierre Paulin (pour le droit de reproduction) © SAIF (pour les droits multimédias)

    Pierre Paulin – Exposition du 11 mai au 22 août 2016 – Galerie 3 – Centre Pompidou, Paris

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